(The promise, 2021)
Traduction : Hélène Papot. Langue d’origine : Anglais
⭐⭐⭐
Ce que raconte ce roman :
Afrique du Sud, 1986. Manie et Rachel Swart, et ses enfants Anton, Astrid et Amor, forment une famille d’Afrikaners qui habite dans une ferme à l’extérieur de Pretoria. Salome est la servante noire qui s’occupe de Rachel, agonisante à la suite d’une longue maladie invalidante. Amor, à peine dix ans, est une fille curieuse qui a son monde bien à elle. Un jour, à l’insu de ses parents, elle les entend parler. Sa mère, Rachel, déjà dans son lit de mort, demande à son mari Manie de léguer une petite maisonnette dans un coin de la ferme à Salome et sa famille, en remerciement pour tout ce que la domestique noire a fait pour elle. Sauf qu’à la mort de Rachel, les choses ne semblent pas si faciles et cette promesse sera repoussée une fois et une autre. Le sentiment d’engagement d’Amor vis-à-vis de Salome et les siens ne fera que grandir au fur et à mesure que les années passent.
Saga de famille dysfonctionnelle :
‘The promise’ se déroule le long de quatre longs chapitres, chacun situé dans une décennie différente, et se centrant sur la disparition d’un des membres de la famille. Galgut construit un univers familier complexe, avec plein de dysfonctionnements, rancunes, éloignements et mésententes parmi le clan des Swart. L’histoire suit l’éclatement de la famille avec une narration complexe et intéressante, mais qui demandera pas mal d’efforts au lecteur.
En effet, le livre n’a pas des chapitres marqués (à part les quatre longues parties qui le divisent), et la narration passera d’un personnage à l’autre d’une façon presque indistincte, dans la continuité. Principalement à la troisième personne, mais avec des réflexions en voix intérieure à la première personne, et même des avis exprimés à la deuxième personne, la narration devient ardue. Souvent le sujet sera exprimé par ‘il’ ou ‘elle’ et le lecteur aura parfois du mal à savoir qui est ce ‘il’ ou cette ‘elle’, jusqu’au paragraphe suivant ou le prénom apparait. Ce petit chaos semble cherché pour véhiculer cette idée de démembrement interne dans la famille, mais quand même cela complique inutilement les choses au lecteur, et donne un air un peu prétentieux à un roman qui aurait pu être splendide s’il avait été narré de façon un peu plus simple.
La structure est quand même très solide : quatre parties, quatre décades, quatre décès. Les personnages sont bien marqués et contrastés, même si le récit se centre finalement sur Amor. Ce parcours initiatique suivra son passage à l’âge adulte, et le développement de son besoin de rattraper tous les torts commis pour cette famille où elle a eu autant de mal à appartenir.
L’histoire des Swart s’étale donc le long de trente-deux ans, dans lesquels s’immiscent les évènements historiques qui ont secoués l’histoire de l’Afrique du Sud, teinte de racisme et de violence. L’apartheid, les tensions raciales, l’arrivée au pouvoir de Nelson Mandela, sa retraite et le repli communautaire de l’après-apartheid. Dans ce sens la famille Swart peut incarner l’Afrique du Sud blanche qui avait promis un univers plus égalitaire pour l’Afrique du Sud noire mais peine à maintenir cet engagement.
Très bon roman malgré un style un peu trop alambiqué et des complications stylistiques pas vraiment nécessaires. Mais si vous êtes fan de Faulkner, Woolf ou Carlos Fuentes, probablement cela va vous ravir. Prix Booker 2021.
Citation :
« Une famille pleine de problèmes, il ne comprend pas ce qui se passe mais ne semble pas s’en préoccuper. L’essentiel du travail consiste à patienter dans un silence respectueux et il a développé une capacité à simuler un calme profond, à l’opposé de ce qu’il ressent. »
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