(The conservationist, 1974)
Traduction : Antoinette Roubichou-Stretz. Langue d’origine : Anglais
⭐⭐
Ce que raconte ce roman :
Sud Afrique en plein apartheid. Mehring a acheté une ferme à l’extérieur de la ville pour essayer de donner du sens à sa vie. Personne ne semble s’intéresser à lui, ni ses maîtresses, ni son fils ni ses collègues. Dans la nouvelle exploitation, il se sent à l’écart des employés noirs, car il n’y connait pas grand-chose sur comment gérer une ferme. Seul le contremaitre Jacobus semble établir communication avec lui, mais toujours depuis une certaine distance.
Un jour le cadavre d’un homme noir apparait dans le marécage de la propriété. Personne ne réclame le corps et même la police ne semble s’en soucier suffisamment comme pour faire une enquête. Mais, une fois débarrassé du cadavre, Mehring continue à être hanté par cette trouvaille étrange.
Histoire d’un colon peu intéressant :
Ce prix Booker est ma deuxième lecture de Gordimer et je dois avouer que ce n’est malheureusement une autrice que je recommanderais. Prix Nobel 1991, Gordimer a combattu inlassablement l’apartheid, et beaucoup de ses romans, dont celui-ci, traitent ce sujet, et mettent en valeur protagonistes blancs qui ont des rapports ambigus, voir racistes avec la population noire. Rappelons-nous que cette œuvre est publiée en 1978, en plein apartheid, donc c’est quand même une œuvre osée qui dérange forcement. Parfois je me demande si le prestige de Gordimer est dû à ce combat par cette cause difficile, plutôt que à la qualité littéraire de son travail.
C’est sans doute bien écrit, mais le style de Gordimer est lourd, lent, confus, chaotique et compliqué. Il y en a beaucoup trop de métaphores et des paragraphes interminables. Les descriptions minutieuses sur des détails visiblement superficiels peuvent rajouter un contexte indispensable pour le roman mais ralentissent énormément le récit. Il y a très peu d’action et quand il y en a, elle est toujours expliquée de façon indirecte ou trop rapide. Je suis 100 pour cent pour le character driven au-dessus du plot driven, mais là, à mon sens il y a beaucoup trop d’introspection psychologique (même avec quelques parties en stream of consciousness), qui finit pour faire un peu indigeste ce roman.
La personnalité de Mehring n’aide pas non plus à s’accrocher à la narration. Personnage inintéressant au possible, il est persuadé d’être quelqu’un d’important, et il cultive sa bonne conscience, mais son insignifiance commence à se faire évidente, même pour lui-même. Ni sa maîtresse gauchiste ni son enfant probablement gay semblent s’intéresser à lui, ses employés non plus, avec la seule exception de Jacobus, qui semble plutôt faire semblant d’être poli. J’en suis persuadé que cet isolement émotionnel du personnage fait partie de la critique du mépris du blanc vers le noir, que Gordimer voulait absolument souligner. Mais, avec un personnage si peu moral et peu profond, du coup, il s’avère difficile d’empathiser ou même de le détester. Personnellement la vacuité de ce personnage a fini par me laisser dans une totale indifférence.
J’ai eu vraiment du mal à finir ce livre et j’ai failli l’abandonner à plusieurs reprises, même très près de la fin. Sans spoiler, le dénouement est cependant relativement intéressant et le côté symbolique du roman prend sa place en toute poésie, mais globalement ce n’est pas une livre ni une écrivaine que j’apprécie particulièrement, et plutôt j’ai trouvé un air daté et prétentieux dans cette lecture. Cependant pas mal de critiques sont dithyrambiques donc à vous de voir.
Prix Booker 1974.
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