(2020)
Langue d’origine : Français
⭐⭐⭐
Ce que raconte ce roman :
Trois Histoires de femmes opprimées dans le Cameroun actuel, qui vont s’imbriquer dans un cycle de mariages forcés, violences conjugales, polygamie et souffrance sans issue possible.
Munyal ! (Patience) :
Ce livre est un cri de cœur et un témoignage bouleversant contre le mariage forcé et une dénonce puissante des tristes destins de milliers des femmes au Sahel. En plus de ces valeurs, déjà importants en soi, il est merveilleusement bien écrit. Pour résumer on serait entre ‘Mille soleils splendides’ de Hosseini et ‘La Tresse’ de Colombani. Les personnages masculins sont des pantins, ils n’ont pas des vraies personnalités, sont juste des figures impitoyables et autoritaires avec plus ou moins cruauté. En revanche, les personnages féminins sont solides et beaucoup plus nuancés. Chacune des trois filles incarne un parti pris différent contre l’oppression. L’apparente soumission, la fuite, la conspiration.
Le nombre limité de possibilités vitales entrainera un univers dans lequel les femmes vont se critiquer et se jalouser, dans l’espoir de pouvoir améliorer leurs vies. Le vrai ennemi c’est l’homme, mais là il y a peu de marge d’action. Malheureusement la tentation de s’attaquer et se détruire entre elles va se dessiner comme une des issues possibles. C’est ce manque de solidarité féminine qui finalement va mener le vrai désespoir. Cela me fait penser (Rien à voir en tant qu’ambiance) au film chinois ‘Épouses et Concubines’ de Zhang Yimou (1991), tiré de la novella de Su Tong, qui traitait le même sujet d’une façon similaire. Quelque part, les hommes, malgré être les coupables dans cette histoire, ne sont pas les moteurs d’aucun des ressorts dramatiques qui parsèment ce roman. C’est toujours ces femmes, dans l’incroyable limite de leurs marges d’action restreints, qui vont essayer de se prendre en charge, pour survivre. Les hommes, littérairement parlant, sont presque inexistants.
Réflexion profonde sur ce devoir de patience des femmes envers les hommes, chacun de ses trois parties commence par ce mot, « Patience » (Munyal en peul). Et c’est ce mot qui va aussi fermer, ironiquement, ce roman.
‘Munyal, les larmes de la patience’, c’est la première version de ce livre, publié en 2017 au Cameroun, et gagneur de quelques importants prix Africains, dont le prix Orange. « Les impatientes » est une reprise que l’autrice a réalisée en 2020, en vue à sa publication en France et Europe. Le Roman a obtenu le Prix Goncourt des lycéens en 2020.
Citation :
« Il est difficile, le chemin de vie des femmes, ma fille. Ils sont brefs, les moments d’insouciance. Nous n’avons pas de jeunesse. Nous ne connaissons que très peu de joies. Nous ne trouvons le bonheur que là où nous le cultivons. A toi de trouver une solution pour rendre ta vie supportable. Mieux encore, pour rendre ta vie acceptable. C’est ce que j’ai fait, moi, durant toutes ces années. J’ai piétiné mes rêves pour mieux embrasser mes devoirs. »
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