(1996)
Langue d’origine : Français
⭐⭐⭐
Ce que raconte ce roman :
Mekwarey, Niger. Malgré les difficultés économiques de sa famille et ses problèmes d’adaptation à l’école coranique, le jeune enfant Talibo est sélectionné pour joindre l’école de la colonie, avec une bourse qui doit lui permettre de poursuivre ses études. Mais la participation de son père dans des activités considérées révolutionnaires, risque de compliquer la situation.
Bildungsroman entre éducation et corruption :
Avec plusieurs romans, des poèmes et quelques recueils de nouvelles, Adamou Idé est probablement l’auteur du Niger le plus connu internationalement. C’est sans doute votre meilleure option de lecture pour cocher la case Niger si vous faites un challenge de lecture around the world. Comme le protagoniste de ‘Talibo’, Idé bénéficia d’une bourse d’études que lui permit de finir ses études en France, avant de revenir au Niger pour travailler dans la fonction publique. Toutes ces expériences sont sans doute la source d’inspiration de ce roman hautement autobiographique.
Très souvent, des romans africains de caractéristiques similaires, pêchent par un excès de didactisme ou de manichéisme, et les critiques du passé colonial parfois prennent la place de la finesse littéraire. Rien de cela ici, ‘Talibo’ est une belle surprise, un roman franchement intelligent, où il n’y a pas des gentils et des méchants, mais plutôt des êtres humains nuancés, où tout le monde a des faiblesses. Le sujet principal serait celui de l’injustice, mais Idé présente plusieurs personnages qui développent ce sujet de tous les points de vue possibles, gardant toujours un côté humain très réaliste, et évitant toute caricature.
Petit à petit, ce roman d’apprentissage suit le complexe parcours de Talibo et sa volonté indomptable de réussir malgré l’injustice, malgré les tragédies, malgré le racisme, malgré le manque de culture ancestrale, et même malgré ses propres faiblesses. Idé nous explique avec finesse et subtilité, l’engrenage de la corruption des institutions coloniales et locales, la violence qui semble encrée dans les mœurs de la société, le poids des valeurs traditionnelles, parfois archaïques et inadaptés aux nouveaux temps, ainsi que la déshumanisation portée par le développement technologique. Sur ces sujets pas faciles, l’écrivain nigérien nous offre des belles et précises réflexions, dans un style simple mais pas exempt de poésie.
Citation :
« Si les poissons s’en vont, que deviendront nous ? »
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