(1944)
Langue d’origine : Français
⭐⭐⭐⭐
Ce que raconte ce roman :
Commune de Fonds-rouge, Haïti. Manuel, fils de Bien-Aimé et Délira, rentre à la maison après un séjour de 15 ans en Cuba, où il a travaillé dans les plantations de sucre à cane. Manuel ne retrouvera pas le merveilleux pays de ses souvenirs. Depuis plusieurs années, une sécheresse épouvantable a tari les sources et condamne les paysans à la faim et à la pauvreté. Manuel veut appliquer les systèmes modernes d’irrigation qu’il a appris à Cuba, mais en plus de trouver une source nouvelle il lui faudra d’abord pacifier la famille. Les deux clans sont à couteaux tirés par une histoire des meurtres commis il y a beaucoup d’années.
‘Romeo et Juliette’ rencontre ‘L’eau des collines’ en Haïti :
Ce magnifique roman, autant épopée romantique que drame humain, est le livre fondateur de la littérature haïtienne moderne. Publié après la mort de son auteur, malheureusement décédé très jeune, il se structure autour d’un double thème : La recherche de la source d’eau (ce qui nous ramène à ‘Jean de Florette’, écrit quelques années après par Marcel Pagnol) et l’amour au milieu de la haine (Dans la ligne de ‘Romeo et Juliette’ de Shakespeare.
Les amours de Manuel avec Anaïsse sont émouvants et touchants et, comme dans la pièce Shakespearienne, chacun appartient à une branche de famille opposée dans la vieille querelle. C’est la faim, la misère et l’absence d’eau ce qui a accentué l’affrontement entre les clans. La lutte des deux amoureux sera ardue, car tout s’oppose à eux, mais leur passion semble destinée à surmonter tous les obstacles. Effectivement, tous les deux sont dépeints comme des personnages positifs et déterminés, qui contrastent avec le conformisme et défaitisme des autres villageois.
Manuel est un visionnaire, imbu des idées plutôt révolutionnaires et communistes qui vont froisser certains et créer des inquiétudes. Il s’érigera en une espèce de messie des meilleurs temps à venir. Il voudrait transmettre son rêve d’un fertile verger, havre de paix, irrigué par l’eau et le bonheur, dans lequel chacun trouverait son compte. Mais ce projet pourtant bien réfléchi soulève des jalousies et des haines ancestrales.
Ce livre court et lumineux nous présente l’être humain dans toute sa misère et toute sa splendeur. Une lecture délicieuse, grâce à son langage raffiné mais simple, son phrasée poétique, son héros inébranlable, sa belle et courageuse histoire d’amour, l’émouvant portrait de la mère Délira, ce combat de l’homme contre l’adversité, et surtout, par cette inoubliable déclaration d’amour à la terre haïtienne, personnage à part entière du roman. Totalement recommandable.
Citation :
« Je viens vous proposer la paix et la réconciliation. Quel avantage avons-nous d’être ennemis ? Si vous avez besoin d’une réponse, regardez vos enfants, regardez vos plantes : la mort est pour eux, la misère et la désolation saccagent les Fonds-Rouge. Alors, laissez la raison parler. Le sang a coulé entre nous, je sais, mais l’eau lavera le sang et la récolte nouvelle poussera sur le passé et mûrira sur l’oubli. »
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