(La ciudad y los perros, 1963)
Traduction : Bernard Lesfargues. Langue d’origine : Espagnol
⭐⭐⭐⭐
Ce que raconte ce roman :
Collège Leoncio Prado, Lima, Pérou. Les militaires tiennent l’établissement d’un bras de fer, avec l’objectif de faire des vrais hommes des collégiens. La recherche de la virilité absolue et l’exaltation de la discipline sont les crédos du collège, mais un petit cercle secret de cadets, nommés ‘les chiens’, prépare un renversement des règles du jeu. Dirigés par le charismatique ‘jaguar’, toujours secondé par le ‘poète’, une de ses premières actions sera le vol du sujet de chimie. Mais ce plan va se compliquer et être le détonant d’un drame aux conséquences imprévisibles.
Devenir un homme :
Roman difficile à lire mais absolument magistral. Pas facile de s’y trouver dans cette narration chaotique (Saut dans le temps constants, narrateurs non identifiés, mélange de dialogues qui se déroulent au même temps…), mais un fois avertis, on est prêt pour plonger dans un univers unique. L’atmosphère est très soignée, souvent glaciale et primitive, autant dans les séquences à l’intérieur du collège comme dans la ville. Tout est froid et violent au même temps, comme si tout pourrait exploser à n’importe quel moment. Les personnages sont très marqués et contemplés de tous les côtés grâce à ce récit polyphonique avec plusieurs narrateurs, qui nous donne une multiplicité des points de vue remarquable.
Le récit est basé sans doute sur le vécu personnel de Vargas Llosa, qui, adolescent, a fait ses études dans l’académie militaire de Lima. Cette expérience aura marqué sa vie et déteindra dans la plupart de ses romans, où on retrouve toujours certains thèmes clés qu’on peut associer à cette épreuve : L’ambiance de discipline militaire, la trahison et la corruption des institutions ; le mélange de classes sociales, la violence, le désir sexuel comme à pulsion primitive, et toujours cette glorification de la virilité non exempte de sarcasme.
Sans spoiler, un évènement tragique va affronter les deux leaders du cercle des chiens ; le ‘jaguar’ et le ‘poète’, qui vont se disputer la responsabilité de la tragédie. Cette opposition sera aussi un affrontement de classes car le ‘jaguar’ est issue d’une classe populaire, tandis que le ‘poète’ est d’extraction bourgeoise. À la sortie du collège, leur différend social ne fera qu’accentuer le fossé qui les sépare.
C’est complexe, mais patience, petit à petit les pièces de l’histoire se mettent en place et si on s’accroche, on découvre un prodige narratif mène par un talent de virtuose. Ce premier roman de Vargas Llosa a marqué à jamais la littérature Latino-américaine, et a ouvert la voie de ce qu’on va par la suite appeler ‘Boom latino-américain’.
Citation :
« Maintenant, il avait perdu tout espoir ; il ne serait jamais comme le Jaguar, qui s’imposait par la violence, ni même comme Alberto, qui pouvait se dédoubler et feindre pour que les autres ne le transforment pas en victime. Lui, on le perçait à jour instantanément, tel qu’il était, sans défense, faible, un esclave. »
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