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Les étoiles s’éteignent à l’aube

Richard Wagamese

(Medicine walk, 2014)
Traduction :   Christine Raguet.   Langue d’origine : Anglais
⭐⭐⭐⭐

Ce que raconte ce roman :

Franklin Starlight, jeune homme d’origine indien, a grandi avec un vieil homme qui lui fait de père, mais à seize ans il apprend que ce père biologique qui a été toujours absent, souhaiterai le rencontrer une dernière fois. Eldon Starlight, le père, très affaibli et ravagé par l’alcool, demande Franklin de l’accompagner faire un dernier voyage dans la terre de leurs ancêtres pour pouvoir mourir en paix et être enterré en pleine nature comme un guerrier, selon la tradition indienne ojibwé.

Parcours thérapeutique :

Le titre français ‘Les étoiles s’éteignent à l’aube’, insiste plus sûr le côté poétique de l’œuvre, tandis que le titre original ‘Medicine walk’ (Chemin médicinal, ou Parcours thérapeutique) sonne beaucoup moins glamour en français, mais présente les vrais enjeux du roman avec ce voyage qui effectuent le père et le fils, l’un en quête de rédemption et l’autre de réponses, et tous les deux à la recherche de la paix de leur âme. Le récit se construit comme une espèce de Road trip, vertébrant le roman autour de ce parcours initiatique, agrémenté de successifs flashbacks qui progressivement vont nous illustrer sur le complexe et traumatique passé du père de Franklin, au même temps que les deux hommes avancent vers la destination ultime dans un paysage enclavé et sauvage, d’une beauté à couper le souffle.

On le sent dès le début, cet être abjecte qui a abandonné son fils et qui semble mener une vie de débauche et de misère morale, est aussi un homme blessé, qui n’a pas pu ou pas su faire autrement que choisir la bouteille avant son propre fils. Même si on ne le comprendra peut-être pas, on sera enclin à le juger avec moins de rigueur lorsqu’on apprendra son vécu. Face à lui, le garçon, également traumatisé, mais beaucoup plus solide et entier, s’est renfermé dans une carapace qui le protège, mais aussi l’isole. Le long de ce parcours au bout d’eux-mêmes, ces deux êtres perdus, écorchés par la vie, pourront peut-être trouver un chemin vers l’apaisement. Sans aucune concession au larmoyant ni au pathos, malgré le côté tragique du récit, ‘Medicine walk’ est un merveilleux roman rempli d’humanisme et d’émotion tout en retenue et finesse.

Les personnages parlent très peu, les dialogues sont très courts et éparses. Chacun, incluant le vieil homme qui est devenu le père adoptif de Franklin, a choisi le renfermement comme a seule option possible pour faire face à la dureté de la vie. La communication étant difficile avec des mots, il faudra chercher d’autres moyens pour exprimer ces sentiments complexes. Avec un ton sobre mais rempli de poésie, bercé par les paysages majestueux de l’Ontario, l’auteur nous propose une belle réflexion sur le sujet de la transmission et la quête de la sérénité.

Wagamese, d’origine ojibwé, décéda malheureusement en 2017, mais laisse une ouvre solide et émouvante, centrée sur la culture amérindienne, et la recherche de l’identité.


Citation :

« Il était indien. Le vieil homme lui avait dit que c’était sa nature et il l’avait toujours cru. Sa vie c’était d’être seul à cheval, de tailler des cabanes dans des épicéas, de faire des feux dans la nuit, de respirer l’air des montagnes, suave et pur comme l’eau de source et d’emprunter des pistes trop obscures pour y voir, qu’il avait appris à remonter jusqu’à des lieux que seuls les couguars, les marmottes et les aigles connaissaient. »

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