(Limón Blues, 2002)
Traduction : Pas connue. Langue d’origine : Espagnol
⭐⭐
Ce que raconte ce roman :
Puerto Limón, Costa Rica, première moitié du XXe siècle. La fleurissante ville attire le jamaïquain Orlandus Robinson, qui travaille dans les exploitations de la United Fruit company, pour subvenir aux besoins de sa famille jamaïquaine. Le noir Orlandus tombe amoureux de doña Leonor Fernández, une femme blanche et mariée de la bourgeoisie locale. Leurs amours étant impossibles, Orlandus se concentre sur la cause des droits de la communauté noire, et s’associé au militant Marcus Garvey, un intellectuel jamaïquain leader de l’UNIA, un mouvement social qui prône la libération des noirs, l’amélioration de leurs conditions de travail, et le retour à la terre mère d’Afrique.
Passions croisées et luttes sociales :
‘Limón Blues’, sans traduction française connue, est un roman complexe qui traite plusieurs sujets très intéressants, comme la différence des classes, l’histoire social des mouvements noirs au caraïbes nées dans les exploitations agricoles au début du XXe, l’identité costaricaine traditionnellement blanche et le racisme vers les travailleurs immigrés, noirs descendants des esclaves. Tous ses sujets se mélangent avec la trajectoire d’Orlandus et ses histoires incroyablement passionnelles avec les femmes de sa vie, l’inaccessible et fascinante Leonor, et la pragmatique mais humble Irene. Le roman ne reste pas à ce triangle amoureux et prend des formes foisonnantes, suivant aussi la perspective d’Irene dans sa quête du bonheur.
Tous ces sujets composent un roman souvent trop confus et irrégulier. Narré à la troisième personne, dans la deuxième partie le récit change parfois à la première personne pour exprimer le point de vue intérieur des personnages. Pas sûr que cela marche dans ce roman, déjà trop exubérant et pas assez maitrisé. Le récit saute très souvent dans le temps, passant de la Jamaïque, au Costa Rica, et puis à d’autres pays des Caraïbes, aux États-Unis et au Liberia, espèce de rêve final africain d’Orlandus. Il y a énormément des éléments qui partent dans tous les sens, sans que le récit puisse bénéficier d’une structure nette. Du coup, le roman risque de devenir fatigant à lire, malgré l’énorme intérêt des enjeux et des thèmes traités.
La partie la plus intéressante de ce roman est à mon sens le portrait d’une cause et d’un personnage qui existèrent vraiment. L’UNIA, Association universelle pour l’amélioration de la condition noire, fondé par Marcus Garvey à New York en 1917, marqua vraiment l’histoire de la communauté noire aux États-Unis et le mouvement s’exporta aux Caraïbes, où il s’associa à des syndicats noirs des exploitations bananières de la région, comme la fameuse United fruit Company.
Marcus Garvey (1887-1940), surnommé le Moïse noir, fut membre fondateur et un des principaux leaders du mouvement. Dans le cadre de la UNIA, il éditait le journal The negro world, et promouvait la cause du retour des descendants des esclaves dans la terre mère d’Afrique. Le roman intègre ce personnage et une partie de cette tentative de retour dans les terres de Liberia, regardé de mauvais œil pour le FBI, les puissances internationales et les intérêts économiques, qui voyaient le mouvement de Marcus Garvey échapper à leur contrôle et devenir potentiellement dangereux.
L’histoire de ce mouvement social et ce rêve de libération noire sont traités avec sensibilité et passion, mais cela ne suffit pas à relever une narration beaucoup trop éparpillée et incohérente. Le roman reste intéressant et même fascinant par moments mais trop souvent chaotique et pas vraiment abouti.
Citation :
« On pourrait prospérer si on ne nous discriminait pas. On aime le Costa Rica, c’est calme, il y a du travail, de la terre, ; mais ici on ne nous permet pas d’être propriétaires ; nos enfants qui sont nés ici ne sont pas considérés citoyens costariciens ; ils ne voient pas avec de bon œil qu’on aille à la capitale ni aux autres démarcations ; en plus ils nos insultent (…) » (Traduction improvisée)
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