(仮面の告白, Kamen no kokuhaku, 1949)
Traduction : Dominique Palmé. Langue d’origine : Japonais
⭐⭐
Ce que raconte ce roman autobiographique :
Kochan est un jeune enfant torturé qui découvre avec angoisse sa sexualité et son identité. Fasciné autant par le corps des hommes que par des images morbides teintes de sang, son passage à l’adolescence se veut difficile et rempli de souffrance. Très complexé par son physique frêle, incapable de comprendre sa différence, Kochan essaie de faire comme les autres et refoule ses désirs, se forçant à aimer le corps des femmes qui l’indifférent complètement. Lorsqu’il connait Sonoko, la fascination qui éprouve par la jeune fille semble le mener vers le chemin de la ‘normalité’. Mais…
Homosexualité refoulée, désirs morbides et nombrilisme assumé :
Dans ce beau roman autobiographique Mishima déverse probablement ses propres angoisses et se met à nu sans complexe. Assez marquant pour l’époque, ce récit d’une homosexualité refoulé (et plus d’autres désirs moins avouables) dut causer un certain scandale dans la conservatrice société japonaise des années 50. Mai, vu de nos jours, le roman se voit comme un exutoire un peu rébarbatif et autocentré, dans lequel l’auteur est en permanence en train de nous parler de lui, par moments jusqu’à la nausée. C’est quand même beau.
Il n’y a presque pas ou peu d’action, le récit se simplifie à la découverte de ses désirs cachés, son refoulement, et ses essais désespérés pour devenir l’hétérosexuel convenable qu’on attend de lui. Son problème est que les images qui éveillent ses désirs ne sont pas seulement celle des jeunes hommes musclés torse nu, sinon les éclairs écarlates des filets de sang qui se déverseraient sur ces mêmes corps. Tourments, blessures, tortures, sadisme, c’est tordu et perturbant. Notre protagoniste, dans sa quête d’oublier ces désirs interdits, s’accroche à une relation avec une jeune fille qui pourrait le faire intégrer une certaine normalité, mais dont le côté purement physique l’horrifie et tétanise. Un simple bisou qui le laisse du marbre semble le franchissement d’une étape importante, mais sera-t ’il capable d’aller au-delà ?
Le récit se mélange avec l’éclatement de la deuxième guerre mondiale, et malgré son souhait d’y participer, Kochan ne pourra pas être mobilisé au combat par son état de santé fragile. Ce conflit international ne va pas vraiment s’entremêler dans l’histoire, restera en toile de fond de l’intrigue, qui va continuer à se centrer sur la complexe psyché et les obsessions de son protagoniste, et le masque qu’il s’impose lui-même pour cacher ses penchants homo-érotiques et morbides.
Très superbement écrit (La plus récente traduction de Dominique Palmé semble épouser parfaitement le style sobre mais poétique de l’auteur), ‘Confessions d’un masque’ est un récit perturbant qui peut fatiguer par moments par un excès de nombrilisme, mais qui est sans doute essentiel pour comprendre les démons qui hantaient cet écrivain un peu maudit et qui, loin de s’apaiser avec l’âge, finirent par le pousser à mettre fin à ses jours en 1970.
Citation :
« Ce que je voulais, c’était mourir parmi des étrangers, paisiblement, sous un ciel sans nuages. Pourtant mon désir était bien éloigné des sentiments de cet ancien Grec qui souhaitait mourir sous un ciel éclatant. Ce que je voulais, c’était un suicide naturel, spontané. »
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