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Crime et châtiment

Fiodor Dostoïevski

(Преступление и наказание, 1867)
Traduction : Doussia Ergaz, Vladimir Pozner.   . Langue d’origine : Russe
⭐⭐⭐⭐

Ce que raconte ce roman :

Saint-Pétersbourg. Rodia Raskolnikov, un étudiant qui vit dans la misère et criblé des dettes, échafaude un plan farfelu pour tuer l’usurière Ivanovna, avec l’idée de se libérer des dettes, mais aussi avec le délire d’en faire un monde meilleur en éliminant un personnage nocif par la société. Mais le crime tourne mal et Raskolnikov doit improviser. Les conséquences du meurtre seront néfastes pour Raskolnikov, car il n’avait pas prévu les remords ni le sentiment de culpabilité. Pour lui, ces problèmes de mauvaise conscience sont le début d’une longue descente aux enfers.

Criminel en quête du châtiment expiatoire :

Quoi d’autre on peut dire de ce roman qu’on n’ait dit déjà ? Souvent considéré comme un des meilleurs romans de l’histoire de la littérature, ce récit nous plonge dans un univers sombre et noir, qui fait réfléchir sur la quête du pardon et des possibles voies d’expiation de la faute. Pessimisme, christianisme et existentialisme se mêlent dans ce récit polyphonique rempli des personnages qui vont contraster, par ses positions, avec la position de l’auteur du crime.

Les délires de grandeur de Raskolnikov, qui s’imagine en grand homme, sont le venin qui va favoriser son crime. Si les grands dirigeants n’hésitent pas à tuer des milliers d’innocents pour le bien d’une idée commune, pourquoi il devrait hésiter à tuer une simple usurière, dont la disparition ne ferait sinon soulager plein d’âmes innocentes ? (Voir citation en bas) Il faut se libérer des contraintes de la morale pour pouvoir créer un monde meilleur. Il se voit en ‘surhomme’, au-dessus du bien et du mal. En se comparant à Napoléon (« Si un jour, Napoléon n’avait pas eu le courage de mitrailler une foule désarmée, nul n’aurait fait attention à lui et il serait demeuré un inconnu. »), il rassemblera assez de courage pour ôter la vie de l’usurière.

Mais cet idéel humaniste va contraster avec la sordidité de son crime et sa propre conscience. Tiraillé par les remords, il lui sera impossible de profiter des conséquences du meurtre, donc cela invalidera l’élan humaniste que lui avait impulsé en premier lieu. La déchéance morale se cerne sur Raskolnikov. En se croyant traqué, surveillé par tous, au centre du monde mais pour les mauvaises raisons, son état physique se dégrade et la fièvre s’empare de lui. Seulement par sa relation avec une prostituée il réussira à voir au-delà des remords, des tourments et de la paranoïa. Deux déchus de la société face aux enfers de l’âme humaine.

Fiodor Dostoïevski avait été en Sibérie et en prison pendant des longues années, ces expériences-clés ont mis les fondations du travail préparatoire du roman, comme témoigne la lettre à son frère Mikhail, 7 ans avant la première publication du sériel :

« En décembre, je commencerai un roman… Tu te souviens peut-être que je t’avais parlé d’un roman-confession que je voulais écrire après tous les autres, en disant qu’il me fallait encore vivre cela moi-même. Maintenant, j’ai décidé de l’écrire sans retard… Je mettrai mon cœur et mon sang dans ce roman. Je l’ai projeté au bagne, couché sur les bat-flancs, en une minute douloureuse de chagrin et de découragement… Cette Confession assoira définitivement mon nom. »

‘Crime et Châtiment’ c’est un récit sombre et pessimiste, sur le bien, le mal et la quête de rédemption. Roman fleuve avec multitude de personnages et des thématiques, mais orbitant toujours autour du sujet de la culpabilité, c’est un des classiques russes incontournables.


Citation :

« Il y a cent, mille bonnes œuvres ou bonnes initiatives qu’on peut entreprendre et mener à bien avec cet argent que la vieille a voué à un monastère ! Cent, mille existences peut-être, mises sur la bonne voie ; des dizaines de familles sauvées de la misère, de la décomposition, de la ruine, de la débauche, des hôpitaux pour maladies vénériennes, et tout cela avec son argent ! Tue-la et prends son argent, dans l’intention de te consacrer ensuite, avec l’aide de cet argent, au service de l’humanité et de la cause commune : qu’en pense-tu, est-ce que ce petit crime minuscule et unique ne sera pas effacé par ces milliers de bonnes actions ? »

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