Littérature des 5 continents : AsieIsraël

La boîte noire

Amos Oz

(Ḳufsah sheḥorah, 1986)
Traduction : Sylvie Cohen. Langue d’origine : Hébreu
⭐⭐

Ce que raconte ce roman :

Ilana écrit son ex-mari Alexandre après un amer silence de 7 ans. Elle s’est remariée et vit à Jérusalem avec son nouveau mari, le juif orthodoxe Michel Sommo, et leur fille Yifat. Alexandre Gidéon, l’ex-mari d’Ilana, vit aux États-Unis où son prestigieux status universitaire lui permet de vivre aisément. À travers cette première lettre, Ilana demande à son mari une aide économique pour régler la situation de leur fils commun Boaz, qui a été expulsé du kibboutz et n’arrive pas à trouver sa voie.

Boaz est un adolescent géant, imprévisible et colérique. Son père Alexandre va dans un premier temps accéder à la demande de son ex-femme et envoyer de l’argent. Mais le nouveau mari d’Ilana, Michel Sommo, se mêle dans la correspondance en demandant encore plus d’argent, dont une partie serait destiné à sa cause favorite, le grand Israël. L’avocat de Alexandre, Maître Zakheim, par amitié avec son client, intervient aussi dans l’échange épistolaire pour s’opposer à ce qu’il considère un abus. Bientôt sera le tour de Boaz d’écrire directement à son père, dont il avait réussi à pratiquement oublier l’existence.

Roman épistolaire sur les blessures non cicatrisés :

Le roman dans sa totalité est intégré par des lettres (Parfois télégrammes) échangées entre les deux ex-époux, et puis petit à petit d’autres personnages interviennent aussi avec leurs missives, créant un ensemble kaléidoscopique de relations souvent hantées par l’incommunication, la mésentente et aussi le calcul et la manipulation. Depuis le début, le ton des premières lettres est très amer et rancunier, les deux ex-époux ne se sont pas pardonnés, et en plus, ils ont beaucoup de non-dits à éclaircir.

Ces prémices promettaient un roman psychologique vraiment intéressant, mais à fur et à mesure que les langues se délient et que des nouveaux personnages interviennent, le roman fait énormément de surplace, avec des redondances constantes. Presque sans action, tournant autour des mêmes sujets, le roman aurait pu facilement se développer dans la moitié de pages. Ce problème d’édition fait trainer le roman sans pour autant soigner plus les aspects psychologiques ni développer d’avantage leurs relations interpersonnelles. Il y a beaucoup trop de longueurs et répétitions, malgré que le livre soit bien écrit et les personnages soient solides et marquants.

À travers ces lettres les personnalités se dévoilent : Alex est un homme bon mais froid et endurci par le chagrin d’un divorce qui n’a jamais digéré. Ilana, son ex-femme, beaucoup plus chaotique et spontanée, mélange plus facilement le chaud et le froid, mais derrière ses essais de manipulation on voit une mère prête à tout pour ses deux enfants. Son nouveau mari Michel, obsédé par la cause juive jusqu’à un certain suprématisme, détonnerait par son calcul et sa façon désinvolte d’utiliser les autres personnages pour ses desseins, mais il semble se rattraper par l’intérêt qu’il prête à sauver le fils de sa femme de la déchéance. Maître Zakheim, dépasse constamment les limites entre l’avocat et l’ami d’Alex, avec son ton sarcastique mais protecteur malgré tout. Boaz est au début un jeune paumé, presque un écorche-vif, qui aura besoin de beaucoup de maturité pour réussir à dépasser les problèmes dérivés du passé et se remettre dans une voie d’avenir plus solide.

Le titre a bien sur un sens métaphorique, car ce couple, après leur tumultueux divorce, doivent se pencher sur les restes de leur mariage et ressasser ce qu’il s’est passé, comme les boîtes noires qui expliquent, après un accident aérien, comment et pourquoi la catastrophe s’est produite.

Petit bémol pour la traduction des lettres de Boaz, qui est censé pas écrire correctement en hébreu, mais qu’en français a été traduit d’une façon assez peu réaliste. Quel jeune écrirait ‘Relijion’ ou ‘Silance’ mais ferait par la plupart de bons accords de participe passé ? En tout cas, roman bien intéressant au départ mais que je ne conseillerais pas forcément.


Citation :

« Bonjour Alec ! Si tu n’as pas détruit cette lettre à l’instant même où tu as reconnu l’écriture sur l’enveloppe, c’est que ta curiosité est plus forte que ta haine ou que ta haine a besoin d’être alimentée. »

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