(Похождения Чичикова, или мертвые души, 1842)
Traduction : Henri Mongault. . Langue d’origine : Russe
⭐⭐⭐
Ce que raconte ce roman :
Roman inachevé.
Russie, 1820. Pavel Ivanovitch Tchitchikov arrive dans la petite ville de N. et passe quelques jours à se faire connaître et aimer de la mondanité et des nobles locaux. En parallèle, Tchitchikov interroge la petite société du coin sur des probables épidémies qui auraient pu décimer la population. Au bout d’une semaine, lors d’une invitation à diner chez Appatov, l’arnaqueur déplie son plan. Il propose de racheter toutes les ‘âmes’ mortes de la propriété, en autre, tous les serfs décédés les dernières années.
« J’ai l’intention d’acheter des morts… » :
L’arnaque de Tchitchikov est assez complexe car il faut se placer dans la société russe du début du XIXe siècle et dans l’absurde de sa bureaucratie. Le nombre d’âmes (terme qui désigne un serf mâle dépendant d’un seigneur) détermine la valeur d’une propriété et l’impôt foncier redevable. Puisque les recensements se faisaient tous les 5 ans, certains âmes mortes restaient officiellement vivantes encore quelques années pour l’administration, donc soumises aux impôts. L’achat des âmes mortes à petit prix, délestait les propriétaires de cet impôt à payer. Puis l’arnaqueur plaçait ses ‘âmes’ dans une propriété fictive, qui hypothéquait par la suite à un prix élève.
Après Apatov, notre anti-héros se rend, une après l’autre, dans toutes les propriétés de la région, avec la même offre de rachat de morts. Même réaction perplexe à chaque fois, mais la perspective d’une baisse d’impôts considérable, provoque toujours un accord facile, notamment quand le tout semble se faire dans des termes légaux. Le long de ce périple, une myriade de personnages hauts en couleur prend vie devant nous, montrant souvent le côté peu cultivé, avare ou directement abruti de cette bourgeoisie campagnarde.
À mi-chemin entre la comédie, la critique sociale et l’étude de mœurs, l’œuvre est considéré un classique de la littérature russe de tout le temps, mais l’histoire de l’édition du livre ‘Les âmes mortes’ entamé par Gogol au début des années 1830 fut remplit de vicissitudes et rebondissements en tout genre, incluant des manuscrits brulés à plusieurs reprises. La première partie, la seule finie, fut publié en 1842, après maintes années de réécriture le long de ses voyages en Europe. Gogol repartit en exile, convaincu que l’œuvre serait incomprise. ‘Les âmes mortes’ en effet fit scandale, notamment par la vision très critique de la Russie et ses institutions, mais le succès s’installa malgré tout, et la Russie entière attendait avec impatience la deuxième partie.
Depuis son exile et pendant ses maints déplacements en Europe, Gogol essayait de travailler dans cette deuxième partie, qui devrait bénéficier d’un élan moralisateur. Suite à une illumination religieuse survenue dans sa maturité (pèlerinage en terre sainte inclus), Gogol s’acharna à récrire plein des chapitres, en vue à rajouter un point de vue croyant qui aurait dû baigner la deuxième partie du roman et transpirer sur le sens global de l’œuvre. Malheureusement, l’auteur, en proie à ses démons et sombrant dans la dépression, rentra en Russie et, quelques jours avant sa mort, brula la plupart du travail dans un dernier autodafé, laissant le projet inachevé. Seulement quelques séquences de cette deuxième partie ont finalement survécu toutes ses épopées, mais la critique semble s’accorder sur le fait que la qualité littéraire de cette deuxième partie aurait été bien inférieur à celle de la première partie.
Citation :
« Eh quoi ! Un homme peut ainsi se ravaler, devenir si mesquin, si vilain, si ladre ! Est-ce vraisemblable ? Tout est vraisemblable, la nature humaine est capable de tout. L’impérieux jeune homme d’aujourd’hui reculerait d’horreur à la vue du vieillard qu’il sera un jour. »
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