(The seven moons Maali Almeida, 2022)
Traduction : Xavier Gros. Langue d’origine : Anglais
⭐⭐
Ce que raconte ce roman autobiographique :
Colombo, 1990. Maali Almeida est un photographe spécialisé dans la guerre qui affronte les Tamouls aux Cinghalais en Sri Lanka. Il vient à peine de se réveiller, qu’il découvre qu’il est mort. Dans une espèce de bureau destiné à organiser l’au-delà, Maali comprend qu’il a été assassiné mais il ne sait pas par qui ni pourquoi. Il n’a que sept lunes, donc sept journées pour le découvrir, avant qu’il ne doive rejoindre un endroit appelé ‘la lumière’. Le long de ces journées Maali déambulera désespéramment parmi des vivants et d’autres fantômes comme lui, pour essayer de comprendre sa nouvelle situation, faire l’enquête de son propre assassinat, et découvrir comment il peut communiquer avec ceux qui ont resté vivants pour les mettre en garde contre un danger inconnu.
7 jours dans l’au-delà pour tout résoudre :
‘The seven moons of Maali Almeida’ remporta la prestigieux prix Booker en 2022. Le roman mélange habillement deux sujets principales apparemment opposés : D’un côté le réalisme magique de cet univers de l’au-delà, et puis le conflit Tamoul-Cingalais, celui-là bien réel. Le tout servi avec une bonne écriture et émotion, mais avec une structure un peu chaotique et beaucoup trop de confusion et des digressions.
Maali Almeida découvre relativement vite le fonctionnement de l’au-delà : Il est invisible, inaudible et intouchable pour les vivants. Il ne peut être présent que là où son cadavre a été, ou là où on parle de lui. À l’aide d’autres habitants fantasmagoriques de cet univers intermédiaire après la mort, il apprend à voyager dans les courants d’air dès que son nom est mentionné quelque part. Ce mécanisme permet à Karunatilaka de faire des liens très rapides entre les scènes, mais aussi va créer pas mal de confusions narratives.
Pour compliquer les choses, l’écrivain Sri-lankais narre ce récit à la deuxième personne. Ce n’est pas un narrateur que se dirige vers quelqu’un comme si lui écrivait une lettre, no, c’est une vraie narration à la deuxième personne. C’est-à-dire que le narrateur est omniscient mais s’adresse en permanence à notre protagoniste, qui est présent, sous une forme ou une autre, dans toutes les scènes du livre. La confusion grandit lorsque certains flashbacks essaient de donner plus de contexte aux personnages ou expliquer les situations. Fantômes plus personnages réels plus narration à la deuxième personne plus flashbacks, égal à roman difficile à suivre.
Le contexte historique est peut-être le sujet le plus abouti du roman, et il est très bien immiscé dans le récit, où il participe énormément des enjeux dramatiques. La guerre civile sévit le Sri Lanka pendant des décennies, notamment dans les années 80 et 90s et malgré qu’elle conclût officiellement en 2009, elle continue sporadiquement dans un conflit que semble loin d’être fini. Le conflit opposa la majorité cingalaise bouddhiste, toujours au gouvernement, avec la minorité Tamoul, composé majoritairement par des hindous, mais aussi avec une partie musulmane. Les Tamouls souhaitant un pays indépendant mais n’ayant pas la majorité pour le faire avancer. Cette cause est appuyée par certains groupes à caractère terroriste. La colonie britannique attisa d’avantage le conflit, en favorisant les Tamouls pour des postes de responsabilité et des emplois mieux payés, provoquant tensions et déséquilibres économiques entre les deux populations.
Maali a une double appartenance, moitié cingalais, moitié Tamoul, et il se définira comme simplement Sri-lankais, ce qui probablement (sa mort à part) sera son problème majeur. La plupart des personnages du livre jouent un rôle ambigu par rapport au conflit, mais Maali et, jusqu’à un certain point ses amis proches DD et Jaki, resteront souvent à l’extérieur, presque sans vouloir se positionner. Maali a fait des photos qui témoignent des comportements abjects dans les deux camps, mais refuse de se voir réduit à choisir un camp, malgré que tout semble le pousser à le faire.
C’est un beau et très original roman mais je le trouve que partiellement réussi. Beaucoup trop de narration confuse et des digressions en tout genre, qui ne semblent pas justifiées. Les personnages ne sont pas énormément approfondis. Mais surtout le roman manque cruellement d’une structure solide qui permette de faire avancer les enjeux du roman palier par palier. C’est dommage qu’ayant 7 lunes à expliquer, on n’a pas profité pour bien séparer les concepts et les faire avancer progressivement.
Bon, même si parfois fatigant. Certaines critiques sont dithyrambiques, donc à vous de voir.
Citation :
« Is God unable to stop evil? Or unwilling? » (« Est Dieu incapable d’arrêter le mal ? Ou n’a-t-il pas envie ? ») (Traduction improvisée)
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