(Mashi, 1918)
Traduction : Hélène Du Pasquier. Langue d’origine : Bengali
⭐⭐⭐
Ce que raconte ce recueil de nouvelles :
Recueil de nouvelles du prix Nobel indien, centrés sur des histoires de couple, de famille, de deuil et de sentiments contraires, souvent axés sur le mariage et la condition féminine.
Nouvelle ‘Mashi’ : Jotin est un homme âgé en fin de vie, marié à Mani, une jeune femme capricieuse et frivole, plus intéressé aux biens qu’elle va hériter de son mari qu’à son agonie. Mashi, la vieille servante dévouée, s’en charge de perpétuer devant le malade l’illusion que la jeune épouse vénère son mari, quand en réalité elle n’en a pas le moindre intérêt pour lui. Tandis que Mani veut se tenir à l’écart du lit de son mari Jotin, Mashi fait croire au mourant que sa jeune épouse est tellement perturbée par sa santé qu’elle ne veut pas lui montrer ses larmes. Mashi utilise des rapports indirects pour maintenir l’illusion, mais plus l’agonie dure, plus difficile sera maintenir la supercherie.
Mariage, famille et d’autres contrariétés :
Dans ces nouvelles il y a souvent des affrontements par des sentiments contraires, des réputations mises en jeu, des plans qui tombent à l’eau, des catastrophes et des imprévus. Rien ne se déroule comme nos protagonistes auraient voulu, les oppositions sont constantes, souvent ce qui fait le bonheur de quelqu’un, entraine le malheur chez quelqu’un d’autre. Les personnages, parfois gentils parfois égoïstes mais toujours nuancés et humains, se trouveront dans des dilemmes émotionnels qui peuvent déboucher dans des tragédies. Le fatalisme et résignation traditionnellement rattachés à la culture indienne sont très présents et développés dans ces récits, ainsi comme la spiritualité, toujours avec un regard très respectueux posé sur les traditions ancestrales.
Le style est épuré et direct, et l’écriture est solide. Les personnages, les intrigues et les thèmes sont simples, toujours bien construits et menés. Les nouvelles sont souvent très courtes, mais en quelque pages Tagore réussit à présenter les personnages, ses motivations et ses hésitations et les confronter à des situations imprévues qui bouleversent leur quotidien. À travers ces chamboulements, Tagore fait la lumière sur la complexité de la société indienne de l’époque, et réfléchit sur la place de la femme et ses possibilités d’émancipation. Sans donner des leçons morales ni perdre de vue la réalité sociologique, le mariage (souvent arrangé) est un des sujets de prédilection de Tagore.
Les nouvelles parlent d’un temps probablement révolu, et de ce fait un certain air désuet domine la narration, même si en réalité les enjeux sociétaux restent toujours d’actualité.
Citation :
« Est-il absolument nécessaire le bonheur ? »
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