(Pitʾwm bʿwmeq hayaʿar, 2006)
Traduction : Sylvie Cohen. Langue d’origine : Hébreu
⭐⭐⭐
Ce que raconte ce roman :
Dans un village enclavé, isolé par des forêts interminables, les animaux ont disparu, les chiens, les vaches, les poissons, même les cafards. Les habitants vivent dans la peur de l’extérieur et d’une créature maléfique appelé Nehi. Personne n’a le droit de s’approcher de la forêt, et la nuit tous les habitants restent renfermés chez eux. La seule qui semble vouloir parler des animaux disparus, est la maitresse Emmanuela, qui continue à montrer des images des animaux, et à en parler de l’époque avant la disparition. Fascinés par les racontars de ces êtres fantastiques, les enfants Matti et Maya décident de braver l’interdiction et rentrer dans la forêt pour essayer de percer le mystère.
Où sont les animaux ? :
Un court conte à priori pour des enfants, mais peut-être plus intéressant pour des adultes, plein d’imagination et finesse, avec une réflexion philosophique accessible et simple sur la tolérance et l’acceptation de la différence. Ce récit fut inspiré par les enfants de l’auteur, mais un petit côté sombre nous fait plus penser à un lecteur adulte.
Matti et Maya sont des enfants très différents : Maya est élancée, courageuse et a beaucoup de personnalité. Matti est timide, renfermé et peureux. Leur voyage dans la forêt va les dévoiler des choses sur eux-mêmes dont ils n’en savaient rien. Matti et Maya seront obligés de murir s’ils veulent que le monde des adultes ne sombre pas définitivement dans l’oubli du passé.
Car les adultes, dévorés par un étrange sentiment de culpabilité, ont fait une espèce de pacte de silence qui, au fur et à mesure, les fait ignorer la diversité du monde dans lequel ils habitaient jadis. Ce monstre, Nehi, est l’incarnation de cette angoisse qui les empêche de quitter le village et rentrer dans la forêt hostile. Condamnant à l’exile ou à l’ostracisme celui qui est différent, les villageois oublient petit à petit tout ce qui en vaut la peine.
Le sujet de la majorité qui exclut ceux qui sont différents est traité avec élégance et finesse, sans être trop lourd dans le message « il faut accepter la différence ». Cela reste sobre et retenu, une belle parabole sur le respect d’autrui. Mon seul hic c’est qu’il s’arrête trop tôt, avant de pouvoir aller plus loin, c’est dommage car l’univers du récit avait un grand pouvoir de suggestion.
Citation :
« En effet, quiconque refuse de se fondre dans le moule, d’être comme tout le monde souffre de la maladie du hennissement, ou du hurlement, ou de Dieu sait quoi, et alors, il a intérêt à se tenir à l’écart pour ne pas contaminer les autres. »
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