(Jo confesso, 2011)
Traduction : Edmond Raillard. Langue d’origine : Catalan
⭐⭐⭐⭐⭐
Ce que raconte ce roman :
On suit la vie du jeune Adrià, élève surdoué qui va osciller entre les intérêts que ses parents ont fixé pour lui : Les hautes études des langues, pour son père, et le violon, pour sa mère. De toute cette pression pour la réussite, et de ces parents absents émotionnellement, il va en garder quelques séquelles. Au fur et mesure que Adrià fait des études sur des manuscrits médiévaux et sur des violons anciens, d’autres épisodes historiques vont se rajouter au récit. Comme l’histoire du violon qui garde son père, Félix. Un violon du XVIIIème siècle d’une valeur incalculable.
Tour de force prodigieux :
Ouf ! Par où commencer ? Ce roman est tellement énorme, et pas seulement en taille. Un livre difficile, très exigeant (Normalement il y a une guide de personnages avec leur époque à la fin du récit, qui est assez utile) et en plus très long, mais si on arrive à dépasser les quelques difficultés et à se laisser porter par le récit, le voyage est tout simplement époustouflant. Cabré fait une pirouette narrative-littéraire de haut voltige. Cela va bien au-delà de ‘Les Voix du Pamano’, roman déjà complexe, mais ici avec ‘Confiteor’ c’est l’explosion.
On est devant de calques et couches et sur-calques et sur-couches narratives, sur des temps et époques très différentes que se chevauchent et s’entremêlent constamment. Parfois ces changements se produit au milieu d’un paragraphe. On commence une phrase au siècle XXe et à la fin de la phrase on est dans un monastère 700 ans auparavant. C’est confus et étrange, mais on s’y habitue, et tout cela prendra petit à petit du sens. Rien n’est gratuit, ce roman est porté par une profonde réflexion littéraire. Il faut rester assez concentré, mais petit à petit cela devient plus facile et on commence à apprivoiser ce roman foisonnant.
On suit les arcs narratifs des objets d’une façon très exhaustive. Par exemple, l’exceptionnel violon qui le père garde dans son bureau, est construit par Storioni aux siècle XVII, mais Cabré commencera par expliquer l’histoire du bucheron italien qui essaie de vendre le bois avec lequel ce violon sera fabriqué. Des histoires des manuscrits aussi nous font remonter des siècles en arrière, jusqu’au Monastère de Sant Père del Burgal au IXème siècle. Ces objets vont suivre leurs trajets à travers les guerres et les conflits qui ont secoué l’Europe. L’inquisition, les nazis, tout y passe.
Quelqu’un disait que c’est un livre sur le Mal. Je suis assez en désaccord, il y a tellement de thèmes que je n’arrive pas à sélectionner quels sont les sujets majeurs du roman. Même les thèmes sont foisonnants dans ce roman.
Malgré cette mise en garde sur la complexité et exigences du roman, ce livre n’est pas un livre à étudier, style Joyce. Pas de panique : Ce livre se lit avec plaisir et bonheur littéraire. Il faut rester un peu attentif au départ, c’est tout. Si vous cherchez un livre simple qui ne vous prend pas la tête, cherchez plutôt ailleurs, ‘Confiteor’ ne fera pas l’affaire.
Destiné à devenir le classique de référence de la littérature catalane du début du 21ème siècle, on est devant d’un ambitieux chef d’œuvre, signé par un des grands écrivains de notre époque.
Citation :
« Ne me regarde pas comme ça. Je sais que j’invente des choses : mais ça ne m’empêche pas de dire la vérité. »
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