(Holzfällen, 1984)
Traduction : Bernard Kreiss. Langue d’origine : Allemand
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Ce que raconte ce roman :
Vienne, Autriche. Un homme, suite à une rencontre lors de sa promenade en centre-ville, se retrouve invité à une soirée chez des gens qu’il a fréquentés il y a une vingtaine d’années mais que maintenant trouve abominables. La soirée se déroule le jour de l’enterrement de Joana, une connaissance commune qui s’est pendue.
« Pensais-je dans le fauteuil à oreilles » :
Notre protagoniste passe 120 pages du roman, assis sur un fauteuil à oreilles, à réfléchir, philosopher, regretter d’être venu et à déblatérer (intérieurement) sur tout le présentiel. La phrase « Pensais-je dans le fauteuil à oreilles » se répète au moins deux ou trois fois par page, ce qui donne plus de deux-cents fois la fameuse phrase. Un fois qu’il quitte son satané fauteuil à oreilles pour passer à table, la phrase se remplace par « dit le comédien du Burg », qui se répète à son tour maintes fois. C’est des exemples de l’ennuyeuse répétition de ce roman, sans doute totalement voulue et cherchée, mais pas pour autant plus intéressante ni génial.
Un autre exemple : « Mais une telle pensée n’est pas prise au sérieux, pensé-je, bien que de telles pensées, qui ne sont pas et ne seront jamais prises au sérieux, soient des plus sérieuses, comme je le sais, et qu’il n’y ait même de véritablement sérieuses que de telles pensées qui ne sont pas prises au sérieux. Pour pouvoir survivre, il nous faut toujours penser sérieusement des pensées qui ne sont jamais prises au sérieux, pensé-je ». Si vous trouvez cela génial, ce livre est pour vous. Si, comme moi, vous trouvez ça creux, fuyez. Si vous hésitez, commencez, en 20 pages vous serez fixés.
Tout est redondant, chaque minime évènement est ressassé sans rajouter des éléments nouveaux. Cela aurait été une merveilleuse nouvelle, car l’histoire, les personnages, les tensions, les pensées et en général tout ce que le livre raconte est très intéressant, mais au moins 70 par cent du récit est pure répétition inutile et injustifiée. Au lieu de plus de 200 pages, 50 ou 60 pages auraient suffi largement pour nous offrir un récit détonnant.
Du côté positif, le roman m’a encouragé à relire le magnifique ‘Le Canard sauvage’ d’Ibsen, dont il est question dans le récit.
Certains personnages présents dans le roman (si ce n’est pas la totalité) sont basés sur des personnages réels existants. Bernhard fut face à des plaintes pour diffamation par des personnes qui se reconnurent dans le récit. Ce règlement des comptes, probablement produit plaisir à l’écrivain, mais malheureusement, c’est encore sans intérêt pour le lecteur.
Le livre est un long monologue intérieur narré à la première personne, sans chapitres, sans paragraphes, sans points à la ligne. Le stream of consciousness (suivre le courant de la pensée d’un personnage qui peut dériver à tout moment) n’est pas une technique que j’apprécie en général. Popularisé par Virginia Woolf ou Proust entre autres, elle eut son moment. Certains de ces romans résistent mieux au passage du temps que d’autres. ‘Des arbres à abattre’ était déjà hors tendance en 1984 et a encore plus vieilli maintenant. C’est un roman prétentieux et démodé écrit pour un écrivain de talent qui s’en fout complètement du lecteur lambda que je représente.
Citation :
« Pensais-je dans le fauteuil à oreilles. »
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