(El abuelo, 1897)
Traduction : Pas connue. . Langue d’origine : Espagnol
⭐⭐⭐
Ce que raconte ce roman théâtral :
Après recevoir la nouvelle de la mort de son fils, le comte d’Albrit rentre du Pérou, Abasourdi par la perte du fils, tourmenté par l’échec de son aventure américaine, ruiné et presque aveuglé, il se replie sur la maison familière pour essayer de trouver du un apaisement pour ses vieux jours, près de ses petites filles. Mais une nouvelle surprise va relancer les conflits. Une de ses deux petites filles serait illégitime, la fille des amours de sa belle-fille Lucrecia avec un peintre. L’aristocrate sur le déclin se propose de découvrir laquelle de ses petites filles est de son sang.
Dilemme entre le sang et l’amour :
Le comte d’Albrit, même dans le crépuscule de sa vie, dépourvu d’argent et influence, reste un homme orgueilleux, fier de sa lignée, qui va semer l’animadversion de partout par son mauvais caractère et ses provocations sans fin. Seulement Dolly, sa petite fille, semble lui professer un amour et affections authentiques. Ce vieux grincheux et pessimiste, convaincu que Dolly est sa petite fille légitime, voit l’espoir renaître grâce à une petite enfant.
Belle réflexion sur les apparences et la vraie nature de l’amour, qui ne peut pas être décodé par des liens purement génétiques. Le roman est assez prédictible mais le travail psychologique est poussé, et la narration se suit avec facilité. Ici plus que jamais, le talent de Galdós pour les dialogues est clairement à l’œuvre, avec des résultats de grand richesse lexique et stylistique. Car le roman est écrit comme une pièce de théâtre, seulement avec dialogues, mais il a la longueur et l’envergure d’un roman.
‘El abuelo’ fut adopté par Galdós lui-même en une pièce de théâtre plus courte, et fut portée au cinéma à maintes reprises, la tout dernière par José Luis Garci en 1998, qui fut nommé à l’Oscar au meilleur film étranger, avec Fernando Fernán Gómez dans le rôle-titre.
Pérez Galdós, un génie très méconnu :
Probablement l’écrivain espagnol le plus réputé après Cervantes, le travail de ce génie du XIXe siècle est très méconnu dans l’univers Francophone, et donc très peu traduit. C’est bien dommage car il s’agit d’une œuvre gigantesque de dimensions Balzaciennes, autant par le volume que pour la qualité littéraire : ‘Fortunata et Jacinta’, ‘Miaou’, ‘Miséricorde’, ‘Doña Perfecta’, ‘Trafalgar’ sont seulement quelques romans remarquables parmi une œuvre colossal à tous les niveaux.
Dans la plupart de l’œuvre très prolifique de Pérez Galdós on retrouve une grande perspicacité psychologique qui nous permet de capter, par le biais d’un nombre incalculable de personnages, l’essence de l’humain et les inquiétudes de l’homme (et la femme) espagnol du XIXe siècle. D’un côté la classe moyenne, souvent décrite avec des airs de supériorité vis-à-vis des classes moins favorisées, mais tiraillée par une profonde angoisse de la perte de privilèges, et de la chute social et économique qui menacent toujours à l’horizon. Les classes plus populaires sont travaillés avec de la profondeur et de l’ironie, mais aussi avec tendresse et compassion. Le riche a peur de devenir pauvre, et le pauvre a peur de rester dans la pauvreté. L’utilisation des dialogues souvent vulgarisés, et des tournures de phrases très populaires, aide à comprendre ce côté « voix du peuple » qu’on a souvent associé à Galdós. Son style sobre, directe et épuré, recherchant le naturel au-dessus de tout artifice, n’est pas exempt d’un phrasée créatif et poétique et d’une richesse lexique fabuleuse.
La capacité de travail, la facilité et le talent pour l’écriture de Galdós sont évidentes quand on voit qu’il a écrit plus de 80 romans, environ 30 pièces du théâtre, des incalculables essais et publications, et a dirigé plusieurs magazines spécialisés, en plus de devenir député libéral pendant des nombreuses années. Naturaliste, costumbrista et réaliste à parts égales, Galdós connait très bien l’Espagne et connait aussi très bien la nature humaine. Son travail sur le côté misérable autant que sur le côté lumineux de l’être humain, couplé avec le réalisme de la société représentée, et l’incroyable finesse et diversité de ses personnages féminins, nous permet de situer ce géant de la littérature espagnole quelque part entre Zola et Balzac, et sans doute dans le panthéon des plus grands écrivains européens de la deuxième moitié du XIXe siècle.
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