Littérature des 5 continents : EspagneEurope

La famille de Pascal Duarte

Camilo José Cela

(La familia de Pascual Duarte, 1942)
Traduction : Jean Viet.   . Langue d’origine : Espagnol
⭐⭐⭐

Ce que raconte ce roman :

Pascal Duarte est en prison en attente de son exécution. Il remémore sa vie, dès son enfance difficile et remplie de violence familière, aux crimes qu’il a commis, en passant par les évènements que lui ont empêché de quitter l’Estrémadure.

Violence dans l’Espagne rural :

Beau même si terrible roman, qui nous dépeint l’Espagne rurale sur son aspect le plus sombre, violent et impitoyable, où les bas instincts et la fatalité vont de la main.

Pour ce roman si scabreux, Cela s’était muni de classique ressort du récit écrit pour un personnage et simplement transmis tel quel pour l’écrivain. En voulant se détacher comme ça de la violence du récit, et même en évoquant que lui-même avait déjà censuré certaines parties, Cela pensait fuir la critique et la censure tout en aiguisant la curiosité des lecteurs. Malgré ce stratagème, le scandale et la censure se sont quand même emparés du livre. Les premières éditions furent vite retirées mais le roman circula en cachette, jusqu’à qu’une troisième édition vit le jour en Argentine, et déboucha sur une nouvelle édition modifiée du livre, sortie en Espagne en 1946.

Le décor aride de cette contrée isolée à la chaleur écrasante du sud de l’Espagne est le cadre idéal pour ce récit simple et cru, rempli d’un pessimisme noir et primitif, dans lequel le prix Nobel Espagnol se sent à l’aise. Des histoires truculentes, un enfant battu régulièrement par son père, la mort qui rode la famille et la malchance et l’infortune qui se cernent sur Duarte, vont déboucher sur l’inévitable tragédie.

Le genre du tremendismo, avec comme protagoniste la violence dans le milieu rural, est un thème qui accompagne le roman espagnol du franquisme et post franquisme, et dont Cela est un des pionniers. Un autre exemple de ce genre, qui pourrait compléter la lecture, serait ‘Les saints innocents’, chef d’œuvre du génial Miguel Delibes, sorti en 1981.

Malgré qu’on soit touché par l’enfance abominable de Duarte (Père violent et alcoolique, mère austère et peu cultivée, frère handicapé et sœur dépravée) et par la malchance qui se cerne sur lui, et que lui empêche de fuir la fatalité, c’est difficile de justifier ses actes ou même de les comprendre, nettement parce que, visiblement, il ne semble éprouver aucun regret. En effet, il n’hésite pas à décrire ses atrocités avec un ton absolument factuel et froid. Son récit est totalement dépourvu d’émotion, glaçant, sans empathie.

L’omniprésence de la religion et le côté sombre de la nature humaine sont les partis pris par Cela, il a beau se soustraire de la narration, on le sent présent à chaque page.


Citation :

« De mon enfance, je ne garde pas précisément de bons souvenirs. Mon père, Esteban Duarte Diniz, était portugais. Quadragénaire, quand j’étais encore enfant, il me paraissait haut et lourd comme une montagne. (…) il était sauvage, brutal, ne souffrait pas la moindre contradiction, et je respectais cette manie parce que j’y trouvais mon compte. Quand il se mettait en colère, ce qui lui arrivait plus souvent qu’à son tour, il nous flanquait à ma mère et à moi des raclées monumentales pour des riens. »

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