(Out of Africa, 1937)
Traduction : Yvonne Manceron. Langue d’origine : Danois/Anglais
⭐⭐⭐⭐
Ce que raconte ce récit autobiographique :
Récit autobiographique qui retrace les dix-sept ans que l’écrivaine vécut au Kenya au début du XXe siècle. ‘La ferme africaine’ explique la vie de Blixen à la ferme, sa vision de la nature sauvage, des animaux, sa relation avec les peuples indigènes, les Kikuyu en particulier, et aussi avec d’autres expatriés, comme l’aristocrate Dennis Finch Hatton, pour qui elle sera attirée.
Loin d’Afrique :
Karen Blixen, sous le pseudonyme Isak Dinesen, écrivit ce livre quelques années après son départ d’Afrique, et cela explique la métaphore de son titre ‘Out of Africa’ (Loin d’Afrique), malheureusement perdue dans la traduction française. Le récit, teint d’un léger ton de nostalgie, retrace de façon désordonnée des événements qui se sont succèdes il y a longtemps, que maintenant on peut regarder avec le recul qui donne le temps écoulé.
De façon assez factuel, parfois même détachée, Blixen va nous plonger dans sa vie africaine. Il n’y a pas vraiment d’action, ou une intrigue que le lecteur doit suivre, ce livre est plutôt un document, un inventaire de ce qu’elle a gardé de l’Afrique dans son cœur. Chaque chapitre se concentre sur un aspect de la vie à la ferme : L’enfant Kikuyu qu’elle va soigner d’une blessure, l’antilope qu’elle essaie de domestiquer, la vie sociale avec les autres colonisateurs, des problèmes avec les récoltes, etc…
On sent plus d’émotion quand elle parle des peuples d’Afrique (les Kikuyus, les Masaïs, les Swahilis…), auxquels Blixen s’était clairement attachée. Elle est évidente l’admiration qu’elle porte sur ce peuple noble, les Kikuyu, qu’elle n’hésite pas à comparer positivement avec les colonisateurs européens, dépeints avec bien moins des égards par Blixen. Elle partage avec le Kikuyu le respect de la nature avec son coté grandiose et immuable, et aussi leur rapport pur avec la spiritualité et les croyances. Si l’Afrique est la protagoniste, le peuple africain est l’âme du roman.
La romance avec Finch Hatton, aristocrate mystérieux, plus connu par ses absences que par sa présence, est seulement suggéré dans le roman. En revanche, le film adapté de ce livre en 1985, réalisé par Sydney Pollack, mettait bien en avant la relation amoureuse de Blixen et FInch Hatton (Meryl Streep et Robert Redford respectivement). Donc si vous prenez ce livre en vous attendant à la romance exotique hollywoodienne, soyez prévenus, vous serez déçus.
Donc peu d’action, peu de passion, chapitres indépendants, décousus, pas d’intrigue à suivre, et même pas trop de lien qui structure ces petits morceaux de récit. Il s’agit tout simplement d’un cahier de souvenirs. Ce côté documentaire est sublimé par le talent littéraire de Blixen et sa vision poétique de la vie en Afrique. Dépaysement assuré, inoubliable témoignage, plein d’amour et en toute finesse. À compléter avec de lectures d’auteurs kényans comme Ngugi Wa Thiong’o.
Citation :
« Les Kikuyus sont, par nature, amateurs d’imprévus, très différents en cela des Européens qui, eux, cherchent plutôt à se prémunir contre le destin : pour les Noirs, le destin est un ami, ils lui abandonnent leur vie et sont, avec lui, familiers comme avec l’obscurité des huttes : ils sont enracinés en lui et les changements de l’existence ne sauraient les émouvoir. »
0 Comments