(La pell freda, 2002)
Traduction : Marianne Millon. Langue d’origine : Catalan
⭐⭐⭐⭐
Ce que raconte ce roman :
Dans une île enclavée au milieu de l’océan, loin de toute civilisation, un climatologue irlandais, vient s’installer pour un travail de recherche, mais avec l’idée de s’isoler du monde. À l’arrivée de la nuit, des créatures fantastiques et humanoïdes sortent de la mer et attaquent systématiquement le refuge de notre héros. Il est obligé de se barricader dans le phare avec le gardian, seul autre être humain sur l’île.
La peur de l’autre :
Brillantissime roman de Sanchez Piñol, qui en suivant un scénario du film fantastique de série B, nous présente en réalité un huis-clos percutant et profond au même temps que divertissant. Comme dans tout bon huis-clos à deux, les deux personnages sont opposés. Là où notre protagoniste est calme et réfléchi, le gardian du phare est brutal et violent. Ces êtres qui se détestent d’emblée, seront lancés l’un contre l’autre dans l’objectif de sauver leurs vies.
L’action se déroule très vite. Les évènements s’empilent et rien ne devient redondant, à chaque fois qu’on pense que ça va tourner en rond, une nouvelle donnée vient de relancer le roman dans une autre direction. Le rythme est soutenu et maîtrisé, ce roman se dévore. Comme beaucoup d’œuvres du genre fantastique, le coté plot driven du récit prend le dessus, mais ici, cela ne nuit pas ni l’introspection psychologique, ni le coté profond et réfléchi du récit.
L’ambiance est incroyablement bien réussie, le roman baigne dans une atmosphère pesante. Tout est glaçant, froid, gris bleuté, métallique, glauque, inquiétant, puis violent et impitoyable. Sauvage. On sent l’isolement totale dès les premières pages. Très vite on dépossède des éléments qui font humain l’humain, et on se place à la frontière de l’être primitif, à deux pas de la bête, à deux pas de la folie.
Avec son écriture simple et efficace, Sanchez Piñol nous présente un récit fantastique qui n’est sans se poser des questions profondes sur la peur de l’inconnu, la peur de la différence, la peur de l’autre. Les créatures humanoïdes ne sont-elles juste aussi humaines que nous ? Et si seulement elles étaient en train de défendre leur territoire ? Ne sommes plutôt nous les humains le vrai ennemi ici ? Ou c’est plutôt le démon qui sommeille dans chacun de nous ?
Citation :
« Nous ne sommes jamais très loin de ceux que nous détestons. Pour cette même raison, nous pourrions donc croire que nous ne serons jamais au plus près de ceux que nous aimons. »
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