(Et Dukkehjem, 1879)
Traduction : Éloi Recoing. Langue d’origine : Norvégien
⭐⭐⭐⭐
Ce que raconte cette pièce de théâtre :
La pièce s’ouvre sur Krogstad faisant chantage à Nora. Nora est mariée depuis des années avec le banquier Torvald Helmer, et ils ont trois enfants. Traitée comme un objet décoratif par son mari, Nora ne se trouve plus dans ce rôle anodin si dans les conventions. Son mari malade avait besoin d’un voyage très cher en Italie, pour trouver le repos. Pour financer la cure Nora avait souscrit des faux bonds, et avait emprunté de l’argent en cachette à Krogstad.
Kinder, Kirche, Küche :
Drame intimiste centré sur le quotidien d’une famille norvégienne de classe aisée, avec des personnages très marqués avec forte introspection psychologique, et profonde réflexion sur le sujet sociétale de fond. La femme ne doit avoir d’autre opinion que celle de son père, puis celle de son mari. De fille-poupée elle doit passer à épouse-poupée. Elle doit se concentrer sur trois grands piliers, les trois K : Kinder, Kirche, Küche, soit Enfants, Église et Cuisine.
« Alouette » ou « petit écureuil », telle est le seul rôle assigné à Nora par son mari et, par extension, par la société. Ne sachant pas se plier à ce qui est attendu d’elle, Nora fera sa petite rébellion des mœurs, et cela sera impardonnable pour une femme dans la Norvège du XIXe siècle.
Refusant que son mari apprenne l’illégalité qu’elle a commise (à l’origine pour soigner son mari lui-même !), elle commettra des actes encore plus osés et inavouables. La réaction de son mari quand il apprendra sa conduite, mettra Nora face aux contradictions de cette société, qui ne laisse aucun espace de liberté de choix aux femmes en tant que telles (« Il faut que je sache qui de nous deux a raison : la société ou moi »). Effectivement, en tant que femme mariée avec trois enfants, aucun mouvement outre son rôle assigné sera toléré : Kinder, Kirche, Küche.
Et c’est cela qui fit scandale dans cette pièce à forts composants féministes pour l’époque, car Ibsen a bien présenté un univers bourgeois parfaitement convenable, et jusqu’à un certain point idyllique : Le mari est riche, aime profondément Nora, la traite de façon attentionnée et subvient à tous ses besoins, elle a trois enfants qu’elle aime à la folie. Pourquoi alors mettre tout cela en danger ? Par la dignité et la liberté de choix de la femme ? Tel est le dilemme et le débat de cette œuvre à thèse, assez visionnaire pour l’époque.
Citation :
« -Ai-je besoin de te le dire ? Est-ce que ce ne sont pas tes devoirs envers ton mari et tes enfants ? -J’ai d’autres devoirs tout aussi sacrés. -Mais non ! De quels devoirs pourrait-il s’agir ? -Mes devoirs envers moi-même. »
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