Littérature des 5 continents : AustralieOcéanie

La vie singulière de Tristan Smith

Peter Carey

(The unusual life of Tristan Smith, 1994)
Traduction :   André Zavriew.   Langue d’origine : Anglais
⭐⭐

Ce que raconte ce roman :

L’histoire se déroule dans le pays imaginaire d’Efica. Felicity Smith est l’actrice principale et la directrice du Feu Follet, un théâtre d’avant-garde, géré comme une collectivité d’artistes. Elle donne naissance à un enfant avec multiples déformations, surtout au visage et au jambes. N’écoutant pas les docteurs qui proposent un arrêt de soins, Felicity prend Tristan avec elle et s’échappe de l’hôpital pour se barricader au théâtre. Trois hommes qui travaillent quotidien-nement avec elle, croient pouvoir être le père de l’enfant, mais quand Felicity se présente avec cet enfant déformé, leurs réactions seront très différentes. Tristan grandira dans cette ambiance bohème et singulière, un peu à l’écart du monde. Malgré son visage défiguré, ses difficultés pour parler et son incapacité pour se déplacer normalement, Tristan rêve d’être un jour un acteur de caractère.

Un enfant différent dans un monde différent :

C’est un livre étrange et difficile à cerner. D’un côté Carey propose la construction de tout un univers et un pays, Efica, avec ses traditions et ses structures politiques et culturelles. Le livre s’attache aussi à décrire un deuxième pays, le plus grand et puissant Voorstand, qui a des relations complexes avec le premier. On peut imaginer la Nouvelle Zélande et l’Australie comme des modèles pour ces deux pays, mais d’autres critiques soulignent les tensions entre les États-Unis et l’Australie comme à inspiration principale. Quoi qu’il en soit, une grande quantité du temps de lecture est dédiée à la description de ces deux pays, leurs traditions et leurs relations, mais sans trop savoir quel est l’objectif de tout ce world-building.

Car tout le long de ce long livre, j’avais la sensation de ne pas comprendre trop où est-ce que Carey voulait nous mener, et qu’est-ce qu’il s’attachait à nous expliquer au fond. Malgré l’évidente qualité de son écriture, j’ai eu du mal à finir ce livre, dont je n’ai pas cerné les thèmes, et j’ai été très désorienté par la multitude de personnages qu’apparaissent et disparaissent dans ce récit, sans lui donner du vrai sens. La géopolitique et le discours postcoloniale prennent beaucoup trop de place et la narration dérive dans beaucoup trop d’intrigues secondaires.

La première moitié du livre, qui se déroule à Efica, me semble beaucoup plus solide et maîtrisée, avec un numéro restreint des personnages au développement plus marqué, se centrant sur Tristan, la mère Felicity, et ses trois possibles pères. Mais un évènement marquant ouvre la narration vers une deuxième partie plus itinérante, et surtout beaucoup plus confuse. Ce qui devrait être un livre foisonnant, devient un roman chaotique. C’est un éclatement marqué dans le rythme de la narration et dans l’introduction des nouveaux personnages, qui ne favorise pas le récit. Malgré son talent évident d’écriture, Carey peine à maintenir le lecteur accroché précisément par un excès d’ambition. J’ai failli abandonner ce livre quand j’avais lu presque trois quarts, et j’ai trouvé la dernière partie franchement boring, justement par la surenchère de personnages et rebondissements.

Malgré que je n’aie pas été emporté par ‘La singulière vie de Tristan Smith’, je reviendrai sur d’autres livres plus renommés de cet auteur australien, comme ses deux prix Booker, ‘Oscar et Lucinda’ et ‘La véritable histoire du gang Kelly’. Carey a été maintes fois pressenti pour être le deuxième écrivain d’origine océanienne à être récompensé avec le prix Nobel (l’australien Patrick White le décerna en 1973).

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