Littérature des 5 continents : OcéaniePapouasie-Nouvelle-Guinée

Maiba

Russell Soaba

(Maiba, 1979)
Traduction :   Mireille Vignol.   Langue d’origine : Anglais
⭐⭐⭐

Ce que raconte ce roman :

Ce que raconte ce roman : Maiba, fille du chef Magura, est la dernière héritière d’une lignée de chefs plutôt contestée. A la mort de son père, Maiba sera élevée par ses oncles, M. et Mme Wawaya. Mais une ombre de malédiction pèse sur l’orpheline, vue par tout le village de Makawana comme porteuse de malchance et présage de malheur. La jeune Maiba grandit dans un état semi sauvage, n’arrivant pas à soigner sa personne. Négligée spécialement par sa tante qui la méprise, Maiba trouve seulement un peu d’amour avec ses cousins, Siril, Royal Bob et les deux enfants plus petits.

Profitant du vide laissé après la mort du père de Maiba, un ancien du village nommé Doboro Thomas, se positionne en orateur, en vue à prendre le pouvoir sur le village, à l’appui de la corruption et la violence. Une ombre plane sur la destinée de la petite communauté.

Pureté contre corruption :

Roman étrange mais très intéressant, narré avec un ton d’une certaine originalité qui peut dérouter quelques lecteurs, mais qui affirme le talent de son écrivain, universellement reconnu comme la voix littéraire la plus importante de Papouasie-Nouvelle-Guinée. Le récit, très poétique au début, se teint d’un air sombre au fur et à mesure que les conflits explosent.

Le roman est porté par l’aura noble mais brute de son protagoniste principale : Après une enfance en état presque semi-sauvage, Maiba se dévoile courageuse et indomptable. Cette jeune femme à la forte personnalité va incarner ce côté pur et hors de toute corruption, ce monde en contact avec la nature, riche des vraies valeurs de partage et civisme. Mais des forces obscures, partiellement motivés par les conséquences du colonialisme, mais aussi par la propre mesquinerie des individus, particulièrement certains hommes, vont entrer en jeu et menacer cet équilibre ancestral qui a caractérisé la vie du village pendant des siècles. On est dans l’éternelle bataille entre la tradition et modernité, sauf qu’ici la modernité est incarnée principalement par l’alcool, la cupidité et la violence.

Ce conflit débouche par moments dans certaines séquences assez sordides physique et psychologiquement. Attention âmes sensibles, malgré l’absence de détails concrets, une scène de viol peut choquer certains lecteurs, car elle est portée vers des délires absolument dantesques, mélangeant cauchemar et réalité. Un peu à son insu, le roman fait porter à son héroïne le standard du féminisme contre la corruption incarne par les hommes du village, souvent présentés comme faibles, volubiles et violents.

J’ai eu un peu du mal avec l’arc narratif de son cousin Siril, qui m’a semblé trop abrupte et pas net. Et aussi certains rebondissements vers la deuxième partie, demanderaient à mon sens un peu plus de travail d’anticipation, pour éviter des actions trop schématiques. C’est quand même un roman remarquable, très original et créatif dans sa construction, qui surprend et accroche, au même temps qui nous offre un aperçu de la culture et l’ambiance dans cette île méconnue du Pacifique (4ème île du monde selon sa taille).


Citation :

« Le nom coutumier de Maiba, donné par son père, est Yawasa Maibina, ce qui signifie ‘Parabole de la vie’. Le défunt Magura le choisit pour elle probablement par nécessité, pour dissimuler ses craintes et sa culpabilité, qui restaient vagues au demeurant (…) »

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