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Le procès-verbal

J.M.G. Le Clézio

(1963)
Langue d’origine : Français

Ce que raconte ce roman :

C’est l’été dans une ville côtière au sud de la France. Adam Pollo s’est installé dans une villa abandonnée, en hauteur d’une colline qui surplombe la mer. Il s’est coupé de la société pour pouvoir regarder par la fenêtre, vivre en solitude près de la nature et réfléchir à son existence. De temps en temps il retrouve une femme appelée Michelle qui lui fournit de quoi se nourrir et se maintenir, avec laquelle il entretient des rapports complexes. La narration suit les errances sans but précis de cet homme dont on ne sait rien, ni d’où il ne vient ni où il va.

Errances face au néant de l’existence :

Ici, dans son tout premier roman, on retrouve le Le Clézio le plus impénétrable et prétentieux. Pour certains lecteurs ce livre laissera la sensation d’un roman qui a été victime de son époque. Le Clézio propose une espèce de roman existentialiste très sixties, malheureusement vide. Beaucoup d’écrivains de la même époque cherchaient aussi une forme plus originale de raconter les histoires (Vargas Llosa, Tove Ditlevsen, Mishima, Vonnegut, Claude Simon, les cubains, etc…) avec plus ou moins de succès. Ici, à mon avis, le refus du roman conventionnel ne se traduit pas par quelque chose de vraiment créatif. C’est creux, daté et plutôt pédant.

La narration se fait à la troisième personne, mais le récit se tisse à partir des sensations et du vécu du protagoniste. Quand même l’introspection psychologique du roman est finalement assez faible. Ce n’est pas trop clair mais, à travers ses vagabondages et ses étranges rencontres, le roman essaie de nos pencher dans la tête d’un homme qui sombre dans la folie, ou en tout cas qu’il serait perçu comme quelqu’un de détraqué. On ne sait pas s’il sort d’un asyle psychiatrique ou s’il a déserté de l’armée. Il suit un chien, il rentre dans un zoo, il viole une femme, il tue un rat. Le récit se fait par des bribes des instants, des rencontres, des souvenirs au grés des déambulations d’Adam. C’est décousu au plus haut dégrée.

Malgré que le sujet de la marginalité et la dérive schizophrénique du protagoniste semblent intéressants, la recherche de l’originalité littéraire fait partir ce roman dans tous les sens sans qu’il arrive à se centrer sur rien. Il y a fortes chances que cela ait été l’intention de Le Clézio.

Aussi intéressés que vous soyez par le littérature, si vous êtes un lecteur un peu lambda comme moi, probablement vous allez abandonner au bout de quelques pages, et je dirai que vous ferez bien parce cela ne va pas s’arranger. Du tout. Si vous découvrez dès le début que ce roman ne semble pas écrit pour vous, ce n’est pas la peine d’insister. J’ai persévéré mais c’est un de ces livres que j’aurais aimé abandonner plus tôt. Seulement la toute dernière partie semble amorcer un dénouement intéressant et à peu près profond, mais c’est déjà trop tard. Comme moi, le lecteur aura probablement fait le trop plein de digressions et d’exercice stylistique vide.

Dommage car le talent du prix Nobel Franco-britannique-mauricien est évident, comme le témoignent d’autres œuvres qu’on peut qualifier de plus conventionnelles, en particulier le magnifique ‘Le chercheur d’or’. Mais le penchant pseudo-intello de Lé Clézio quand il se met à être créatif, serait à éviter à mon avis.


Citation :

« C’était ça, il y était, il saisissait et laissait fuir au même moment ; il était sûr et pourtant ne savait même plus ce qu’il faisait, ce qu’il allait faire, s’il s’était échappé d’un asyle d’aliénés ou s’il était déserteur. »

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